1.1 Pourquoi parle-t-on d’Augmented Worker ?
DES TECHNOLOGIES AU SERVICE DU COLLABORATEUR
Un collaborateur qui utilise un outil pour améliorer ses performances est, par définition, un Augmented Worker ou Collaborateur Augmenté. L’homme est devenu augmenté dès l’instant où il a saisi une pierre pour briser plus facilement des noix et s’en nourrir. Il ne semble donc rien y avoir de fondamentalement nouveau ici. L’histoire des sciences et de l’industrie peut être racontée au travers des inventions d’outils, ou de machines, permettant l’augmentation de la productivité des travailleurs. Ces gains de productivités se sont d’ailleurs souvent accompagnés de réduction de la pénibilité des activités.
L’«Augmentation» est rendue possible par l’utilisation de technologies permettant au collaborateur d’améliorer la manière dont il réalise son travail. Ces technologies doivent être intégrées dans l’environnement de travail naturel du collaborateur. Elles doivent assister le collaborateur dans ses activités, en simplifiant son travail ou en contrôlant certaines des variables contribuant à de mauvaises performances humaines. En fin de compte, les technologies d’augmentation permettent aux collaborateurs d’effectuer des tâches plus spécialisées avec un degré de qualité plus élevé.
DE L’AUGMENTED WORKER A LA NORME D’UNE INDUSTRIE
Le terme « Augmenté» n’a de sens qu’à partir du moment où l’on a défini un point de référence, une situation initiale. Ce point de référence est le standard actuel de l’industrie considérée. Lorsque dans une industrie, l’utilisation d’un outil devient la norme, il ne devient plus alors possible de parler d’Augmented Worker.
Lorsqu’en 1733 John Kay perfectionne la machine à tisser en développant la navette volante, il augmente la productivité de ses collaborateurs par rapport au reste de l’industrie. Il avait donc créé un avantage compétitif décisif par cette augmentation des capacités de ses ouvriers. Moins de trente ans plus tard, en 1760, son invention est utilisée par toutes les branches de l’industrie textile. L’impact systémique de cette augmentation de productivité était si marquée que l’augmentation de capacité de tissage aggrava la pénurie de fils en Europe, forçant l’industrie du textile à restructurer ses chaines de production et d’approvisionnement afin de retrouver un nouvel équilibre économique. Ainsi, la navette volante est devenue une technologie si répandue dans l’industrie textile que l’on ne peut plus parler de collaborateurs augmentés, car elle est devenue le standard de cette industrie.
L’informatique, faut-il le rappeler, permet de traitement électronique de l’information. Les premières entreprises qui ont eu recours à des outils informatiques ont « augmenté » leurs collaborateurs, les déchargeant de tâches fastidieuses de conservation et de traitement systématique d’informations, préalables à leur vraie fonction qui est d’en tirer de la valeur additionnelle. La productivité, mais aussi la fiabilité de ses entreprises, s’en est trouvée augmentée de façon décisive, leur conférant un avantage compétitif. Bien entendu, constatant l’efficacité de ces nouveaux outils informatiques, les autres sociétés se sont engagées dans la même voie, rattrapant leur retard et menant à ce qu’aujourd’hui aucune société ne puisse opérer dans un environnement compétitif sans y avoir recours.
L’IMPACT DE L’AUGMENTED WORKER SUR LE TRAVAIL DES COLLABORATEURS
Un collaborateur reste un Augmented Worker jusqu’à ce que son niveau de productivité devienne la nouvelle norme de l’industrie. L’instauration de cette nouvelle norme peut nécessiter une réinvention des règles et des équilibres de l’industrie. Quelle est la place du collaborateur dans ce nouvel équilibre ? C’est bien là toute la question. Opposer le collaborateur et la technologie est un faux combat. L’Augmentation ne relègue pas le travailleur aux oubliettes, elle l’oblige à avancer, à se différencier de la machine afin de générer toujours plus de valeur. La technologie doit nous permettre de travailler plus intelligemment en supprimant tout ou partie de ses aspects les plus pénibles. Jusqu’à maintenant, les Femmes et les Hommes ont toujours réussi à inventer de nouveaux métiers pour remplacer ceux ayant disparus.
Uber est un bon exemple des impacts que peuvent avoir les Augmented Worker au sein de leur industrie. Pour devenir conducteur de taxi, la plupart des grandes métropoles, obligent les conducteurs à mémoriser les plans complets des villes où ils veulent travailler. A Londres, « the Knowledge », l’examen pour devenir conducteur, nécessite de connaitre les 25 000 rues et 320 itinéraires. Il faut en moyenne entre 2 et 4 ans pour réussir cet examen. Les téléphones connectés disposant d’un GPS permettent désormais à toute personne de devenir conducteur de VTC en quelques heures. La définition de l’itinéraire étant désormais confiée à une intelligence artificielle. Cette IA a accès à une immense quantité de données historiques et en temps réel lui permettant de définir le meilleur itinéraire à chaque instant. Outre le GPS, le téléphone connecté permet de simplifier la réservation et le paiement de chaque course, améliorant de manière significative l’expérience client.
Après, une période mouvementée de déploiement de ces « Augmented Drivers », l’industrie toute entière est en passe de se structurer autour de ce nouveau standard.
AUGMENTED WORKER OU LA REINVENTION D’ACTIVITES, METIERS ET INDUSTRIES
Lorsque l’on parle d’Augmented Worker, on ne parle donc pas simplement d’outils mais de comment réinventer une activité, un métier ou une industrie en redéfinissant la place de l’Humain et le rôle des nouvelles technologies. Il ne faut pas penser l’Augmented Worker seul mais bien repenser le système dans lequel cet Augmented Worker évoluera.